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  • Photo du rédacteurEn attendant

Objet :

En intervention, décentrée, je me sentais comme un réceptacle.

Les gens s'asseyaient devant moi, se déversaient et repartaient.


Tout ce qui s'échangeait entre nous deux existaient pour eux.

Même mes émotions parlaient des leurs.


Elle : Ça ne peut pas marcher avec moi, ça. Je me connais. J'ai vraiment tout essayer et c'est toujours la même affaire. Y'a rien qui m'aide.

Moi : Je me sens impuissante présentement... Rien ni moi ne peut t'aider...

Elle : Ben non ! Vous m'écoutez, déjà ça m'aide...

Moi : ok, alors de me parler, ça t'aide....


Devant l'autre, en intervention, je faisais des beaux reflets. J'offrais à l'autre un reflet de lui-même, mais plus que son image...

Comme cette sculpture dans le musée que nous regardions côte à côte mon chum et moi il y a longtemps...


On parlait de ce que ça nous faisait vivre, ce que ça nous amenait à réfléchir...


Chacun de nous parlions au final de nous-mêmes.


Ce que l'artiste avait voulu dire était de second ordre.


On consomme l'art pour, entre autres, se rencontrer nous-même... rarement l'autre.

On utilise l'oeuvre pour se regarder.


C'est précisément ce que je fais ici avec mes photos d'oeuvres d'art, mes extraits de film, de série..

Je les reprends, les dénature et les utilise pour illustrer ce que je vis, pour parler de MOI.


Ce film qui met en image mon adolescence. Cette chanson qui me rappelle ma peine d'amour. Cette citation de livre qui décrit exactement ma relation à ma mère. Cette toile qui me fait pleurer, parce que ça me fait penser...


L'oeuvre est un objet que nous utilisons pour scruter notre passé,

développer notre réflexion, exprimer nos émotions...

Comme moi en intervention.

Je me sentais comme un objet utilisé par l'autre pour mieux se comprendre lui-même.


Mais j'étais consentante pour jouer l'objet.

J'aimais même jouer ce rôle.


J'aimais jouer ce rôle ailleurs dans ma vie et bien avant de me retrouver intervenante...


Adolescente, je jouais à me transformer selon le désir de l'autre.


Comme plusieurs filles, tout mon rapport à la séduction a été basé là-dessus.

Je me cache derrière moi et me moule pour me présenter à toi sous les traits de ton désir.

J'ai longtemps été qu'un bel objet avec ce sentiment de vide, de réceptacle.

Insatisfaite, je suis plutôt devenue un bon objet.


Un objet qui apaise les peines, favorise l'introspection, entend toutes les confessions, enterre les confidence, guide sur des chemins lumineux, donne espoir, fait sourire, révèle les talents, les besoins, les désirs de tous ceux.celles qui s'arrêtent et la regarde un instant...


Une artiste du reflet, du ricochet, de la dissimulation.


Même l'attention positive, les compliments, je m'amusais à les rediriger

de plus en plus finement.


Elle : Merci, Madame, merci pour tout ce que vous avez fait pour moi.

Moi : Merci à TOI. TU as décidé de franchir la porte et demander de l'aide. Tu as fait preuve d'un grand courage en te partageant tes vulnérabilités. Bravo à toi pour avoir pris soin de toi.

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Elle : Madame, vous êtes exceptionnelle. Vous me faites sentir tellement bien. Il y a juste avec vous que je suis capable de m'ouvrir comme ça...

Moi : En fait, tu m'as dit que c'est la première fois que tu te donnes le droit de t'ouvrir à quelqu'un comme ça. Si tu t'ouvres de nouveau, à quelqu'un de bienveillant bien entendu, tu retrouveras ce sentiment de bien-être, d'intimité, de confiance. C'est toi qui est la clé pour recréer ce lien que tu as expérimenté ici.


BAM. Ils n'y voyaient que du feu. Chaque fois.

Ils ne me voyaient jamais... derrière tout ça...


Sauf un.


Lui : Pourquoi vous faites ça ?


Il m'avait pris de court.

Je me sentais comme un chevreuil devant les phares, mais tout nue....pas de poils.

J'avais fait semblant de pas comprendre au début. Je souriais, gênée... nerveuse...

Il ne se détournait pas.


Lui : Pourquoi vous ne prenez pas le compliment que je vous donne ?


C'était un étudiant en intervention évidemment.

Fuck.

J'avais semi-abdiqué et prétexté "la distance professionnelle", mais je voyais qu'il me voyait

et il voyait que je comprenais qu'il voyait... bref, j'osais plus le regarder dans les yeux.

J'étais rouge. J'avais chaud.

J'avais finalement été honnête et nommé que j'étais mal à l'aise avec les rétroactions positives sur mes interventions, "ça faisait pas humble".

Ça l'avait semi-satisfait.


Cet échange avait troublé plus que l'intervenante en moi, mais la femme.

Ça m'avait flatté...

Je pense même m'être aperçue à ce moment que j'étais peu familière avec ce sentiment d'être vue. Que quelqu'un soit sincèrement curieux de moi...

Moi-même je l'étais tellement peu (curieuse de moi) que je pouvais pas blâmer les autres.


En y repensant, bien que ça n'avait rien de romantique, je revois ces scènes de films où un homme découvre chez une fille bon-objet... un objet d'intérêt, de désir, d'affection...

Il est le seul à vraiment LA VOIR.

Son désir à elle est finalement assouvie :

entre toutes, elle est vue, spéciale, désirée, choisit et enfin aimée.


En quittant mon rôle d'intervenante, j'ai eu l'impression de quitter cette posture d'objet.

En changeant, j'ai décidé d'être curieuse de moi, de me voir.

C'est naturellement que j'ai décidé d'écrire et de me lire.

De m'exposer ici en étant le seul sujet de ce blogue.

De prendre la parole et de ME raconter. Je décide seule que je suis digne d'intérêt ! ya!

Affirmer ici que JE suis sujet.


Et tranquillement, le sentiment de parler seule, que personne n'écoute a contaminé mon coeur

J'ai cherché à savoir combien avait vu, avait lu mon blogue...

J'ai commencé à m'emballer à l'idée qu'on soit curieux de moi...

à être flatté de l'intérêt et déçue du désintérêt...


C'est tranquillement devenu un besoin... ça a pris de plus en plus d'espace...

Comme une équation dans ma tête, être sujet = être lue.

Et je fais ce parallèle avec ces ingénues dans les films stupides et j

e découvre que j'ai toujours cet espèce de fantasme d'être "découverte" par quelqu'un,

d'être vue parmi toutes les autres... encore vouloir être objet d'intérêt de quelqu'un...

encore vouloir aimée...?

Sérieux?!?!


Je suis découragée.






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