Je m’arrête un instant dans cet espace liminal que je franchis quand j’écris.
Ce moment crucial et glacial d’après-création que je traverse à tire-d’aile.
Je jette en mots, fais mijoter, mets en forme, découpe, laisse tranquille, déclare, ajoute, efface, monte, dégage, remonte... jusqu’à un sentiment de finalité.
Je soupire de satisfaction comme j’entre dans l’entre-deux.
APRÈS le geste créatif AVANT l’envoi dans le monde
J’observe et questionne ma création
Moi qui comprend enfin toute l’utilité de l’espace liminal, ici, je le fuis.
Quand j’y suis, je me tortille sur place, comme une urgente envie de pisser (ou de vomir) qui m’amène à me précipiter sur une porte ou l’autre.
Pendant des années, je terminais rien alors... pas d’espace liminal et pas de partage avec les autres. C’était facile mais insatisfaisant.
Depuis 5 mois, je finis mon geste créatif. Je vais au bout du chemin.
Donc, pas le choix, je traverse le passage obligé où je suis face à ce que j’ai créé.
Je me soumets à la critique. La mienne.
C’est ici que je me demande si j’ai le droit.
Mon espace liminal de création cache cette question d´approbation.
Est-ce que j’ai le droit de faire ça, de passer par ici, de partager ça ?
Est-ce que j’ai le droit malgré que d’autres l’ont fait, le font encore
et vraiment mieux que moi ?
Il est là le noeud.
Je me compare à ceux que j’admire.
Est-ce que j’ai le droit de créer alors que je ne me vois pas leur étoffe ?
Oui.
J’ai le droit d’être apprenti.
J’ai le droit de me tromper et d’apprendre.
J’ai le droit de défricher ce passage.
Une fois que je retire mon ego de cet espace.
Je peux rester tranquille dans l’entre-deux.
Je peux mieux observer ce que j’ai créé et m’en détacher.
Je lui donne le droit d’exister sans le poids de mon égo, de mes attentes...
Je lui donne le droit d’exister à l’extérieur de moi.
Je lui donne le droit d’exister telle qu’elle est.
Elle a le droit.
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